Les perturbateurs endocriniens

Cette fiche prévention répond notamment au premier axe de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2. 2019-2022). Elle permet de renforcer l’information de vos agents concernant les perturbateurs endocriniens et d’évoquer les actions de prévention.

En effet, ces substances se retrouvent dans de nombreux objets de la vie courante : produits ménagers, détergents, produits de traitement des cultures, produits alimentaires, les peintures, etc.

Définition

Les perturbateurs endocriniens sont des substances qui dérèglent le fonctionnement hormonal des organismes vivants et causent ainsi des effets néfastes sur la santé de l’Homme ou d’être vivants de l’environnement. La définition des perturbateurs endocriniens fait encore aujourd’hui l’objet de débats au niveau international. C’est la définition donnée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de 2012, qui est la plus communément admise :

« Un perturbateur endocrinien (PE) désigne une substance ou un mélange qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de (sous)-populations ».

Ainsi, les femmes enceintes et les jeunes enfants sont les personnes les plus vulnérables en raison de leurs effets sur le développement. La lutte contre les PE doit notamment s’effectuer dans les secteurs : de la petite enfance, de la restauration collective, des espaces verts mais aussi au sein des services techniques.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a établi une liste de 906 substances pouvant présenter des propriétés perturbatrices endocriniennes. Ces substances sont déjà interdites ou fortement encadrées en Europe, et d’autres ne sont pas utilisées. L’Anses a identifié 16 substances prioritaires, qu’elle considère comme devant faire l’objet d’une évaluation de leur danger en tant que perturbateur endocrinien.

Le système hormonal ou endocrinien

À quoi sert le système endocrinien ?

Le système endocrinien regroupe les glandes qui sécrètent des hormones tels que : la thyroïde, les ovaires, les testicules, l’hypophyse, le pancréas… Libérées dans le sang, ces hormones agissent comme des messages chimiques naturels entre les différents organes du corps. Elles permettent ainsi de réguler certaines fonctions de l’organisme : la croissance, le métabolisme, le développement cérébral et sexuel, la reproduction, l’alimentation. Les hormones participent ainsi au bon fonctionnement et à l’homéostasie (équilibre) du corps humain.

Les voies d'expositions

De nombreuses études scientifiques, épidémiologiques existent, mais le lien entre les expositions à des perturbateurs endocriniens et les conséquences sur la santé sont difficiles à évaluer. Il existe une grande diversité de perturbateurs endocriniens et de sources potentielles de contaminations auxquelles Hommes et animaux peuvent être exposés.

Cependant, il est possible d’établir les principales voies de contamination :

  • Voie digestive (eau, alimentation, emballages et contenants alimentaires, produits pharmaceutiques, etc.
  • Voie respiratoire (particules, peintures, produits d’entretien, cosmétiques, pesticides, etc.)
  • Voie cutanée (produits cosmétiques, pharmaceutiques, pesticides, textiles, etc.)

Mais aussi, transmission mère/enfant (grossesse, allaitement) ou par des dispositifs médicaux introduits dans le corps.

Les potentielles sources d’expositions et les effets sur la santé

Où se trouvent les perturbateurs endocriniens ?

Dans l’environnement domestique ou professionnel, les molécules identifiées comme présentant un potentiel perturbateur endocrinien sont présentes dans de nombreux produits auxquels il est courant d’être exposé comme par exemple :

  • Des dérivés phénoliques (exemples : les bisphénols, les parabènes, les halogéno-phénols) se trouvent principalement dans les contenants alimentaires (canettes, boîtes de conserve, bouteilles en plastique, pots de yaourts, films alimentaires), les cosmétiques (crèmes hydratantes, gels douche, shampooings, maquillage), les tickets de caisse, les lentilles de contact, les désinfectants, les matériaux de bricolage et de construction, etc. et dans l’alimentation (les conservateurs E 214 à E 219 sont des parabènes)
  • Des phtalates sont présents dans les jouets en plastique / jouets PVC souple, le vernis à ongles, les produits d’entretien, les barquettes alimentaires, les bouteilles en plastique et certains ustensiles de cuisine, dans divers matériaux de bricolage et de construction, des cosmétiques et produits de soins corporels, des textiles, films alimentaires, jouets en PVC souple et dans certains dispositifs médicaux
  • Des alkylphénols (nonylphénols) retrouvés dans les emballages plastiques, les lingettes jetables, les détergents, les lessives ou les cosmétiques
  • Des retardateurs de flammes (polybromodiphényls) présents dans les mousses pour les mobiliers, les tapis et les équipements électroniques, certains rideaux. Ils sont principalement présents dans divers tissus et textiles, mobilier rembourré domestique et professionnel, matériaux de construction comme les mousses d’isolation et appareils électriques (télévision, ordinateurs). Ils peuvent se libérer dans les logements et bureaux plus ou moins vite en fonction des matériaux. Ils sont ainsi présents à des concentrations variables dans la poussière domestique et professionnelle, ce qui implique une potentielle exposition chronique
  • De certains pesticides (exemples : l’atrazine, l’éthylène thiourée) utilisés dans l’agriculture, les jardins particuliers, le nettoyage urbain ou retrouvés dans l’alimentation non biologique
  • Des produits biocides comme les anti-poux ou les traitements des animaux domestiques
  • Les isoflavones (telles que la génistéine, la daidzéine): il s’agit d’une substance chimique naturelle que l’on retrouve notamment dans le soja

 

Par ailleurs, de telles substances sont également retrouvées dans l’alimentation et dans l’environnement (eau, sols, air et végétaux).

  • Dans le domaine de l’alimentation, la contamination peut, quant à elle, provenir de la migration de substances chimiques depuis l’emballage, de résidus hormonaux dans la viande ou de résidus de pesticides ou de métaux lourds (l’arsenic et l’antimoine sont des perturbateurs endocriniens suspectés) dans les viandes, poissons, céréales, fruits ou légumes

Dans le domaine environnemental

Les sols sont essentiellement pollués par : les épandages de pesticides, d’engrais et de boues, les retombées des émissions de polluants aériens et les décharges d’ordures 

    • Les eaux superficielles ou souterraines sont notamment contaminées par des pesticides, des hydrocarbures et des aérosols (ensemble de particules provenant entre autres des fumées issues de procédés industriels, de gaz d’échappement ou des poussières issues de feux agricoles). Il est possible de vérifier les résultats du contrôle sanitaire de l’eau distribuée commune par commune sur le site gouv.fr.

Quels sont les effets sur la santé ?

Les effets des perturbateurs endocriniens sur la santé varient selon l’âge et l’état physiologique des individus exposés. Il existe des « fenêtres de susceptibilité » ou des « périodes de vulnérabilité » durant lesquelles certaines populations sont plus sensibles à leurs actions (ex : femme enceinte ou individu en âge de procréer).

 Les perturbateurs endocriniens vont principalement agir sur l’homéostasie de l’organisme. Les répercussions sur l’organisme peuvent être de divers natures :

  • Altérations des fonctions de reproduction (baisse de la qualité du sperme, augmentation de la fréquence d’anomalies du développement des organes ou de la fonction de reproduction) 
  • Abaissement de l’âge de la puberté chez la femme, endométriose, troubles de la fertilité 
  • Cancers hormonodépendants (ex : sein, utérus, prostate, ovaires, testicules) 
  • Perturbation du fonctionnement de la thyroïde, du développement du système nerveux et du développement cognitif
  • Entrainement de troubles métaboliques tels que le diabète insulinodépendant (type 2) et l’obésité ;
    Les moyens de prévention pour se prémunir des perturbateurs endocriniens

    Comme toute démarche de prévention, il est recommandé de mettre en place les 9 principes de la prévention : éviter, évaluer, combattre, adapter, tenir compte de l’évolution technique, remplacer, planifier, privilégier la protection collective, former / informer

    En commençant par:

    1. Évaluer, repérer et identifier des PE

    L’absence d’un étiquetage spécifique, d’étiquetage et d’information dans les fiches de données de sécurité rend complexe l’identification des perturbateurs endocriniens dans les environnements de travail. Pour effectuer un premier repérage, il est possible de se référer au site internet nommé ED Lists (Endocrine Disruptor Lists).

    Ce site, issu d’une coopération entre la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas, la Suède et la France, recense trois listes :

    • Les substances reconnues comme perturbateurs endocriniens dans l’Union européenne
    • Les substances en cours d’évaluation pour leurs propriétés de perturbation endocrinienne suspectées dans le cadre d’une législation européenne
    • Les substances considérées comme perturbateurs endocriniens dans l’un des États membres participants

    Il est également recommandé de consulter la liste des substances évaluées par l’Anses (liste de plus 906 substances d’intérêt – avril 2021). Malheureusement à ce jour, il n’existe pas d’étiquetage spécifique pour les PE.

    NB : Après évaluation des risques, il est conseillé d’intégrer dans le document unique (DUER), la prise en compte de la situation particulière des femmes enceintes.

    2. Combattre, traiter les PE au même titre que les CMR : de nombreux métiers sont impactés dans le secteur des travaux publics, de la voirie, des agents des musées, des agents d’entretien, les peintres, etc.

    3. Supprimer ou remplacer les PE :

    L’ACTIVITÉ D’ENTRETIEN DES LOCAUX :

    • Nettoyer et désinfecter les locaux lorsque cela est possible par la technique du balayage humide. Cette méthode privilégie l’usage des microfibres humidifiées permettant une accroche des souillures grasses, de la poussière et même des bactéries
    • Favoriser la technique de nettoyage par la vapeur sur les surfaces adaptées (voir notice) :
      Cette méthode consiste à nettoyer et désinfecter les locaux et/ou mobilier par la vapeur, sans produits chimiques. En effet, l’action de la vapeur à haute température assure la détergence et la désinfection des surfaces et permet d’éliminer l’utilisation de produits détergents et désinfectants pouvant être générateurs de perturbateurs endocriniens
    • Supprimer l’utilisation de parfums d’ambiance ou de bougies parfumées. Il est préférable d’aérer les espaces
    • Supprimer l’utilisation de diffuseurs d’insecticide et privilégier la protection physique par (ex : moustiquaire)
    • Favoriser l’utilisation des produits disposant de labels tels que l’écolabel européen, écocert ou encore NF environnement
    • Evitez de stocker des produits d’entretien dans les lieux où le personnel travaille et privilégier un stockage dans un local/armoire dédié(e), fermé(e) à clé et suffisamment ventilé(e)

    L’ACTIVITÉ EN RESTAURATION :

    En restauration collective, il est nécessaire de s’intéresser au contenu des assiettes, mais aussi au contenant, car en effet certains matériaux utilisés en cuisine sont plus susceptibles que d’autres de migrer dans les aliments (ex : BisPhénol A dans les matières plastiques). Afin de limiter une exposition aux perturbateurs endocriniens, il est notamment recommandé de :

    • Privilégier pour la cuisson, la remise en température et le service, la vaisselle en verre, en inox ou porcelaine (de grade « contact alimentaire ») qui sont des matériaux simples, non identifiés comme sujet aux migrations moléculaires dans les aliments
    • Limiter / supprimer, l’utilisation d’ustensiles de cuisine recouverts de téflon (Les perfluoroalkylés (PFC))
    • Prêter une attention particulière au stockage des bouteilles en plastique afin que le contenant ne se dégrade pas à la chaleur (ex : bouteilles laissées dans les voitures).
    • Limiter les aliments industriels « transformés » ainsi que les cannettes de boissons (potentiel présence de films plastifiés)
    • Renouveler, en priorité, tous les éléments en plastique ou en mélaminé qui présentent des signes d’usure (ex : cuillères en plastique, verres, etc.)
    • Prêter attention au bon fonctionnement du rinçage des lave-vaisselles car si une odeur de produit vaisselle résiduelle est forte, cela peut indiquer qu’il reste des résidus de détergent sur celle-ci
    • Tenir compte des recommandations des fabricants (ex : ne pas mettre en contact des aliments gras, T° d’utilisation comprises entre -10°C et +110°C …), notamment pour le film étirable, les barquettes, la vaisselle et les ustensiles
    • Vérifier régulièrement l’étanchéité des bouchons des centrales de dilution et installer-les préférentiellement hors des pièces très fréquentées par le personnel

    NB : Les matières plastiques ne sont jamais vraiment inertes car la chaleur, l’acidité, les contacts avec des substances grasses peuvent favoriser la migration de molécules de bisphénol A hors du plastique. La réglementation européenne prévoit des limites de migration spécifique et des restrictions d’usage pour ces matériaux s’ils sont destinés au contact alimentaire.

     

    L’ACTIVITÉ DANS LES CRÈCHES, LES ÉCOLES MATERNELLES, LES CENTRES DE LOISIRS
    Concernant les établissements dédiés à l’accueil de jeunes publics (écoles, crèches, garderies, centres de loisirs, …), les peintures, les jouets et produits type « fournitures scolaires » peuvent contenir des substances nocives comme le formaldéhyde ou certains solvants irritants pour la peau et les voies respiratoires. Il convient alors de prendre quelques précautions d’usage :

    • Privilégier l’achat de produits de loisirs créatifs (pinceaux, papiers, gommettes adhésives, colles, rubans adhésifs, tampons encreurs, feutres, peintures, maquillage, paillettes, pâtes et sables à modeler, etc.) mentionnant spécifiquement la norme « jouets » NF EN 71 et caractérisés par un marquage « CE » (Conformité Européenne)
    • Favoriser le mobilier en bois brut. En effet de nombreux produits chimiques (tels les peintures, les colles, les vernis) sont présents dans les meubles en bois aggloméré
    • Une vigilance concernant les jouets : certaines peluches peuvent contenir des retardateurs de flammes
    • Tout comme le mobilier, préférer les jouets en bois brut
    • Ne pas utiliser de produits qui s’accompagnent de l’avertissement « Ne convient pas aux enfants de moins de 36 mois » ou « Ne convient pas aux enfants de moins de trois ans »
    • Limiter les activités utilisant les produits de loisirs créatifs spécialement jusqu’à l’âge de 18 mois (exploration buccale trop importante)
    • Ranger les peintures dans une armoire fermée et dans une pièce dédiée au stockage

    Concernant les produits cosmétiques, la peau des jeunes enfants est très perméable, de ce fait il est recommandé d’utiliser le moins possible de produits d’hygiène :

    • Favoriser l’utilisation de l’eau et d’une lavette pour le change des enfants. Les lingettes sont à proscrire. Utiliser de préférence des savons sans parfum.
    • Éviter l’application de produits directement sur la peau (peinture avec les mains, les pieds, le corps) y compris le maquillage.

    AU QUOTIDIEN :

    • Assurer régulièrement le renouvellement de l’air intérieur :
      L’exposition aux perturbateurs endocriniens peut être accentuée par un défaut de ventilation ou une aération insuffisante. Une bonne ventilation et une aération régulière des locaux sont les recommandations essentielles pour diminuer la pollution intérieure. En effet, certains produits d’entretien et/ou matériaux peuvent contenir des allergènes de contact puissants, susceptibles à moyen terme, d’intoxiquer les utilisateurs.

    NB : Conformément à la règlementation en vigueur, tous propriétaires et exploitants de certains établissements recevant du public (ex : écoles, crèches, garderies, …) doivent obligatoirement procéder à la surveillance de la qualité de l’air intérieur des bâtiments. (Décret n° 2015-1000 du 17 août 2015 relatif aux modalités de surveillance de la qualité de l’air intérieur dans certains établissements recevant du public).

    Par ailleurs, il est important de disposer d’un système de ventilation efficace pour diminuer la concentration des polluants. Le bon fonctionnement des Ventilations Mécaniques Contrôlées (VMC) et leur entretien doivent alors être régulièrement assurés (nettoyage des prises d’air extérieures, nettoyage des bouches d’extraction en interne, nettoyage des gaines et du moteur d’extraction par un technicien compétent…).

    • Privilégier une hygiène des mains régulière par lavage à l’eau et au savon simple (réservez l’usage du gel hydro-alcoolique dans les lieux sans point d’eau à proximité)

    NB : Choisir de l’eau et un savon simple ou mieux labellisé (produits dit « naturels », « eco » ou « bio ».) c’est limiter au maximum le risque de laisser des résidus de produits sur la peau.

    • Former et informer vos agents:
      Le rôle du médecin du travail est essentiel pour informer et former les agents sur les risques pour la santé des substances suspectées d’être des perturbateurs endocriniens et sur l’importance du respect des mesures de prévention 
    • Assurer La mise en place d’un suivi médical spécifique des travailleurs potentiellement exposés aux perturbateurs endocriniens est indispensable :
      En l’absence d’information stabilisée sur ces substances et leurs effets, la vigilance s’impose. Les agents exposés à des perturbateurs endocriniens, s’ils sont également classés CMR 1A ou 1B, doivent bénéficier d’un suivi individuel renforcé (SIR).  Il est important d’informer les femmes enceintes ou ayant un projet de grossesse de consulter l’équipe médicale du service prévention.

      Fiche prévention : les perturbateurs endocriniens

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      Références juridiques
      • Loi n°91-1414 du 31 décembre 1991, définit les principes fondamentaux de la protection des travailleurs
      • Article L.4121-2 du Code du travail, sur le fondement des principes généraux de prévention
      • Articles du Code du travail R4412-59 à 93, il convient d’appliquer la démarche de prévention des risques analogues à celle mise en place pour les agents chimiques Cancérogènes, Mutagènes et Reprotoxiques
      • Le règlement relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage (CLP), définit les substances CMR classées 1A, 1B ou H 362
      • Loi n° 2012-1442 du 24 décembre 2012 visant à la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A
      Pour aller plus loin...

       

       

       

       

      • Conseils aux parents :
        Les perturbateurs endocriniens par Dr D. Le Houézec, pédiatre,Caen.
      déontologue te laïcité

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