Publication du 14 juin 2024
La crise Covid a véritablement accéléré le phénomène d’hyper connexion déjà bien installé dans notre société. L’arrivée de nouvelles formes d’organisations du travail comme les organisations hybrides permet de répondre à certains enjeux en termes de conciliation vie personnelle-vie professionnelle et de minimisation des interruptions de tâches entre autres. Si globalement ces organisations sont appréciées, le recours massif aux outils numériques, peut majorer les risques d’hyper-connexion. Dans ce contexte, l’accord-cadre du 13 juillet 2021 relatif à la mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique prévoit un droit à la déconnexion dans la fonction publique.
Droit à la déconnexion : de quoi parle-t-on ?
Le droit à la déconnexion s’entend comme le droit pour tout agent public de ne pas être connecté à un outil numérique professionnel en dehors de son temps de travail.
Ce droit, qui s’inscrit dans une démarche d’amélioration des conditions de travail et d’une meilleure conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle, a pour objectif le respect des temps de repos et de congé.
Ainsi, ce droit permet aux agents publics de ne pas répondre aux sollicitations professionnelles en dehors des horaires de travail sans risque d’être sanctionnés.
Et au plan juridique ?
Le droit à la déconnexion est inscrit au sein du Code du travail depuis 2016. Il précise que les salariés ont le droit de ne pas répondre aux appels, mails ou messages de leur employeur en dehors de leurs heures de travail et ce, pour garantir un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ainsi qu’assurer un vrai temps de repos.
Un droit à la déconnexion spécifique à la fonction publique est consacré dans l’accord télétravail du 13 juillet 2021 mais dépasse toutefois le champ du télétravail.
Celui-ci prévoit que « les modalités du droit à la déconnexion doivent être négociées dans le cadre du dialogue social de proximité ». Le droit à la déconnexion est ainsi repris par l’accord-local du 7 janvier 2022 portant sur la mise en œuvre du télétravail au sein des collectivités territoriales et établissements publics relevant du Comité social territorial de la Seine-Maritime. L’accord invite par ailleurs les employeurs et les agents à s’appuyer sur les travaux menés par l’Anact concernant la charge de travail.
À noter : le Code du travail ne prévoit toutefois pas de sanction spécifique pour défaut de mise en œuvre des dispositions légales sur le droit à la déconnexion.
Quelques chiffres sur « l’infobésité » :
Infobésité : abondance d’information imputées à l’ère numérique – Source : association ACMS – juin 2023 :
Un français passe 56h / semaine devant un écran, soit plus de temps qu’à dormir
%
des français se disent incapables de se passer d’objets connectés, ne serait-ce qu’une seule journée
Quelle mise en œuvre dans la collectivité ?
Au plan règlementaire
Possibilité d’insérer dans le règlement intérieur les modalités pratiques de déconnexion des outils numériques (horaires détaillés, pause déjeuner…) ou de mettre en place une charte autour des bonnes pratiques avec la consultation du Comité Social Territorial autour sur la mise en place d’un plan d’actions dans le cadre du dialogue social de proximité
En complément :
– Communiquer en interne sur ces outils
– Mettre en place des indicateurs de suivi
Changer les habitudes de travail
- Mettre en place des outils numériques « prêts à l’emploi » (ordre du jour, tableau, compte-rendu, planning…) afin de limiter le temps de conception numérique
- Former et sensibiliser ses équipes à l’importance de se déconnecter : ateliers visant à se questionner sur ses pratiques et à en dégager des axes d’amélioration, challenges inter services autour de la déconnexion, limiter le nombre de mails et imaginer l’organisation d’une journée sans e-mails comme le font certaines entreprises par exemple
- Inciter les agents à désactiver leurs notifications de mails durant les week-end et congés
- Ne pas autoriser la prise de repas devant son ordinateur et offrir un espace dédié de restauration
LE RÔLE DU MANAGER
- Montrer l’exemple ! Il est essentiel de vous appliquer à vous-même le droit à la déconnexion que vous demandez à vos équipes : pas de mails le soir ni le week end ni pendant vos congés et montrer que vous n’êtes pas disponible 24H/24H : vous gagnerez en crédibilité !
- Se questionner sur les causes de « sur-connexion » de vos collaborateurs : la charge de travail est-elle adaptée ? L’agent se sent-il bien informé ? Se sent-il coupable de se déconnecter ?….
- Apporter des réponses : réajuster si besoin les missions et sensibiliser aux bienfaits de la déconnexion (importance de l’équilibre vie pro / vie perso, permet de se ressourcer, de prendre du recul et de repartir de l’avant)
Quelles conséquences sur la santé ?
Ne pas se déconnecter du travail engendre des risques à la fois physiques et psychiques.
- Conséquences physiques: fatigue visuelle, maux de tête, lombalgies, troubles musculo-squelettiques auxquels s’ajoutent d’autres troubles liés à la sédentarité tels que le diabète ou les risques cardio-vasculaires notamment. Quant au sommeil, celui-ci est fortement perturbé par la lumière bleue dégagée par les écrans.
- Conséquences psychiques: stress et anxiété augmentés, fatigue de plus en plus présente, troubles du sommeil ou de l’alimentation, voire même la dépression ! Ne pas se déconnecter impacte également votre vie personnelle : manque de disponibilité pour votre famille ou vos proches, troubles de l’attention (risque d’accident) et sentiment de culpabilité.
Soulignons également l’impact social : la sur-utilisation des outils numériques nous rend, et c’est assez paradoxal, moins interactif ! Temps d’échanges réduit, isolement et perte de créativité faute d’un temps suffisant consacré à ses projets, qu’ils soient personnels ou professionnels.
Prévention des risques professionnels
Le droit à la déconnexion fait partie des actions de protection de la santé, de la sécurité et des conditions de travail pour prévenir les risques psychosociaux et préserver la santé mentale des agents.
Il est donc important d’intégrer ce risque dans une démarche globale de prévention des risques professionnels et dans le Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels comme facteur de risque sur la santé mentale et physique.
PAROLE DE PRÉVENTEURS
« Se déconnecter ne suffit pas : il faut couper mentalement ! »
En effet, il ne suffit pas de s’éloigner physiquement de son lieu de travail ou des outils numériques pour se déconnecter ! Il est essentiel de préparer son départ du travail pour se décharger mentalement : établir un planning de travail pour le lendemain, ranger son bureau et se changer les idées avant de rentrer chez soi afin de faire une véritable coupure (marcher, appeler un proche, aller dans un magasin…). Quelle que soit l’activité choisie, l’essentiel est de s’accorder un temps autre que professionnel : c’est essentiel pour une vraie déconnexion !
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